Musées à volonté

Le prix d’entrée dans un musée, dans une exposition ou dans une institution culturelle vous a-t-il parfois dissuadé de pousser la porte ? Pour ceux qui ne disposent pas de carte de presse (ou pour les lieux où celle-ci n’est pas acceptée), pensez alors au PassMusées ou MuseumPass : (https://www.museumpassmusees.be/fr/offre)

Pour 59 euros, un peu plus d’un euro par semaine, vous aurez le libre accès pendant un an dans presque tous les grands musées du pays et dans des centaines d’institutions moins connues. Seuls les lieux gérés par des fabriques d’église font exception : impossible d’accéder à l’Agneau mystique, à Gand, ou au trésor de la cathédrale de Tournai (quand il est ouvert…) avec cette carte. Mais l’ensemble de l’offre reste si vaste et si diversifié que vous n’arriverez pas au bout des visites en un an ni en cinq, même en y apportant une énergie maniaque.

Un des avantages de cette carte est que le nombre de visites dans un même endroit n’est pas limité. On peut donc explorer les grands musées près de chez soi par petites sections, sans devoir parcourir tous les couloirs très vite, en une fois, jusqu’à saturation. Ce libre accès permet également d’entrer jeter un coup d’œil dans des musées plus petits ou un peu singuliers, que l’on côtoie parfois depuis des années sans avoir jamais su ce qu’ils contenaient. On peut alors y passer quelques minutes, le temps de satisfaire superficiellement sa curiosité, ou y rester beaucoup plus longtemps si des affinités imprévues avec les collections apparaissent.

Ci-dessous, on trouvera trois exemples de ces musées de taille réduite dont la silhouette fait partie du paysage urbain mais qu’on connaît trop peu, auxquels le PassMusées donne le libre accès.

1° la Porte de Hal, à Bruxelles

Bien qu’il ait été rénové, on dit le lieu menacé de fermeture prochaine, faute de budget et de personnel. C’est donc le moment de s’y rendre, avant qu’il soit trop tard. Le musée de la Porte de Hal se prête pourtant bien à une sortie pas trop longue mêlant culture et délassement. Encore plus s’il y a des enfants ! Tout est là pour les faire rêver : le bâtiment à l’aspect redoutable, l’interminable escalier en vis, et, tout en haut, le chemin de ronde à créneaux d’où l’on découvre le panorama sur le sud-est de la ville. Pour titiller la curiosité et faire songer à des voyages dans le temps, des gadgets ingénieux ont été ajoutés là-haut, des sortes de longue-vue qui permettent de voir le paysage environnant, animé, tel qu’il était à l’époque de Brueghel. L’expérience en dit long sur la croissance démographique et l’urbanisation intensive des derniers siècles.

Les objets exposés dans le bâtiment sont tous plus ou moins liés à la défense de la ville et à la sécurité urbaine. La mainmise seigneuriale sur l’armée et sur les ouvrages militaires est évoquée au premier étage, dans la grande salle gothique, avec, en plus du matériel de prestige auquel on peut s’attendre, des pièces qui sortent de l’ordinaire : l’armure d’apparat ainsi que les chevaux empaillés et équipés qui ont servi pour la joyeuse entrée des archiducs Albert et Isabelle venus occuper leur poste de gouverneur à la fin du XVIe siècle, par exemple. Ou, plus intime, le berceau de Philippe le Beau, le père de Charles Quint.

Le deuxième étage est consacré au contre-pouvoir des guildes et corporations bourgeoises, qui ont pris une part toujours plus active dans la défense et la politique de la cité. Cette montée en puissance des marchands et artisans au fil des siècles dans les affaires publiques est montrée ici à l’aide des accessoires luxueux qui étaient les emblèmes de leurs compagnies, de leurs chefs et de leurs champions lors des défilés, concours et autres ommegangs. On remarquera, entre autres, les colliers et les décorations accordées aux plus adroits lors des concours couronnant les entraînements au tir nécessaires à la constitution de milices.

Il n’y a pas des milliers d’objets mais tout y est de qualité, bien choisi, bien présenté, bien éclairé. Et une exposition temporaire complète les collections. Actuellement, elle montre des petits théâtres en papier, qui permettaient jadis de reconstituer et rejouer à domicile contes et pièces à la mode.

 

 

2° le Trinkhall Museum, à Liège

© Ville de Liège – Urbanisme, Jean-Pierre Ers

Un autre de ces lieux emblématiques que les passants et riverains connaissent de vue sans y être obligatoirement entrés est le Trinkhall Museum, à Liège. Il se trouve dans un bâtiment à l’aspect futuriste posé dans le parc d’Avroy, à Liège, près de la gare et d’un des grands boulevards de la ville.

Il présente des œuvres de cet art dit « brut », œuvres créées par des psychotiques, des artistes souffrant de handicaps mentaux et par d’autres personnalités fragiles que l’on classe généralement en marge de la société. Poussez la porte des lieux sans a priori, sans vous attarder devant les étiquettes et les classements, sans chercher à savoir si tel dessin provient d’un artiste authentiquement « brut » ou d’un peintre plus ou moins reconnu et professionnel venu confronter son travail aux artistes des ateliers protégés. Le jeu est ici de se rendre aussi disponible que possible à l’inconnu, à la surprise.

L’art contemporain professionnel nous a de toute façon habitués à tous les excès, aux bizarreries, aux montages minimalistes ou à la quasi-vacuité des espaces et des contenus. En comparaison, ce qui est montré ici peut se révéler immensément plus touchant, plus direct, plus véridique, dans le sens où il ne s’agit souvent pas d’objets fabriqués pour un marché mais de créations venues du plus profond de l’être et accouchées tant bien que mal, au gré de l’habileté ou du savoir-faire de chacun.

Certaines techniques s’avèrent particulièrement adaptées à la situation des auteurs, comme la gravure sur lino, par exemple, qui combine une phase entièrement spontanée au moment de la création de la matrice originelle en linoléum avec une autre phase très technique, très maîtrisée, souvent effectuée par un assistant, au moment du tirage. Ces deux étapes distinctes permettent de donner au résultat un bel équilibre entre un côté formellement impeccable et un autre plus improvisé, vécu.

L’accrochage actuel du musée, agréablement varié, est par ailleurs d’une qualité remarquable. Chaque œuvre y est à la fois une proposition insolite et une réussite plastique. On ne peut que recommander la visite qui en surprendra plus d’un.

3° l’Hôtel de ville d’Audenarde

La célèbre silhouette de l’hôtel de ville d’Audenarde domine le paysage du centre urbain, particulièrement radieuse quand viennent l’illuminer les premiers rayons du soleil. Mais ici aussi, les murs cachent un musée attachant, à taille humaine, qui ne demande pas une visite tournant au marathon.

Comme plusieurs autres endroits de la région, Audenarde a connu pendant un moment, au 16e siècle, une industrie du luxe assez prospère, centrée sur la tapisserie. Ce centre de production, de même que ceux d’Enghien et Grammont, s’était spécialisé dans des tapisseries ornées de scènes de genre ou de scènes mythologiques un peu conventionnelles entourées de somptueuses bordures montrant des fleurs, des fruits, de menus animaux et de la végétation en tout genre.

Cette verdure, qui faisait l’image de marque et la réputation des ateliers, finissait parfois par envahir tout le champ de l’image. Dans quelques cas, pour varier l’offre, on choisissait comme sujets des scènes très étranges montrant des animaux fantastiques que ne désavoueraient pas les créateurs de jeux vidéo contemporains. Le visiteur se promène donc (dans une faible lumière pour protéger les couleurs très fragiles) parmi des représentations d’une nature exubérante, où des salades et des chardons géants peuvent abriter des daims et des perroquets, et où des guirlandes de fleurs et de fruits gigantesques peuvent être portées ou escaladées par de minuscules personnages.

Le parcours est complété, à d’autres étages et sous des combles impressionnants, par une collection de peintures et d’argenterie et par une présentation de la région des « Ardennes flamandes ».

 

 

Conclusion

Il ne s’agit là que de trois propositions mais il en existe des centaines d’autres sur la carte interactive du site du PassMusées. Pour une sortie hivernale, près ou loin de chez soi, avec des enfants ou entre adultes, dans le domaine des arts ou dans celui des sciences, qu’on penche plutôt pour les iguanodons de Bernissart, pour l’aquarium de Liège, pour le musée en plein air de Bokrijk ou pour les miniatures de la bibliothèque des ducs de Bourgogne, on trouvera toujours dans ce vaste catalogue quelque chose d’intéressant ou d’imprévu.

Et puisque les fêtes sont à nos portes au moment où cet article est rédigé, pourquoi ne pas envisager d’offrir la carte en cadeau ?

Texte et images D. LYSSE © 11-2022
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